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Atos : les gérants d’épargne s’inquiètent de la restructuration financière.
Alors que les banques ont entamé des discussions avec Atos, des fonds de dette auraient pris contact en parallèle avec l’actionnaire David Layani pour monter une solution alternative, selon nos informations. Tenus à l’écart, les gestionnaires d’actifs d’Arkéa, d’Aéma, Amundi, des banques privées et des assureurs craignent d’être lésés.
Par Anne Drif
La nervosité gagne les gérants d’épargne qui ont financé Atos. En pleine descente aux enfers du géant informatique , ces créanciers n’ont pas l’intention d’être sacrifiés sur l’autel de la restructuration financière de 4,8 milliards d’euros qui s’engage. Au premier rang desquels le spécialiste de la protection sociale AG2R, les gestionnaires d’actifs Schelcher Prince Gestion (Arkéa), OFI (Aéma) et Amundi, ainsi que les banques privées Lombard Odier et Pictet, qui figurent parmi les porteurs d’un bloc de 1,2 milliard d’euros de dette obligataire à échéance 2028-2029, selon nos informations.
Officiellement, les négociations pour la restructuration pilotée par la mandataire Hélène Bourbouloux n’ont pas démarré. Le black-out persiste autour de l’évaluation des besoins de trésorerie d’Atos menée par Accuracy, qui sera déterminante pour arrêter les coupes financières nécessaires.
Mais deux groupes menés par des hedge funds d’un côté, et les banques de l’autre, ont déjà engagé de premières manoeuvres pour sauver leur mise. De quoi laisser craindre au groupe de gérants d’épargne et d’assureurs d’être lésés par ces discussions menées en coulisses. « Derrière les porteurs de dette, il y a des épargnants et ils ont souscrit via des Sicav ou des assurances-vie de façon directe et indirecte de la dette à 100 % de sa valeur et qui en vaut moins d’un tiers ! » s’agace un acteur du marché.
« Ils risquent d’y perdre si les deux autres groupes négocient sans eux des garanties pour leur propre compte et si Atos n’a plus les moyens de les rembourser ensuite ! Rien ne dit que leurs négociations en aparté vont résoudre le problème », dit un autre.
Première cible de leurs critiques, les banques, les seules avec qui Atos a ouvert officiellement des discussions, d’après son communiqué du 5 février. Parmi les 22 établissements qui portent ensemble une créance de 2,4 milliards d’euros, les sept en première ligne seraient BNP Paribas, Société Générale, CIC (Crédit Mutuel) et Natixis (BPCE), ainsi que Commerzbank, ING et Barclays.
Tout sauf un nouvel Orpea
« Si l’on repartait sur un nouvel Orpea, ce serait un scandale », lâchent plusieurs créanciers ulcérés, faisant référence à des privilèges obtenus par les banques lors de la première restructuration. Une mise à l’écart qui était allée jusqu’à mettre en alerte la procureure adjointe de la République au tribunal de Nanterre sur la pérennité de la solution trouvée. A peine plus de quatre mois après, Orpea ouvrait une seconde procédure.
« Que les banques discutent de façon privilégiée est légitime, nuance un connaisseur du dossier. Atos leur demande de nouvelles lignes de financement en affacturage et en garantie pour soutenir sa note de crédit, sans quoi certains de ses contrats avec des clients peuvent être en risque. » On évoquerait un besoin de l’ordre de 800 millions d’euros. Or, elles font déjà face au risque de non-remboursement d’une première échéance de 1,5 milliard en janvier 2025.
Les banques, en réalité, ne sont pas vraiment plus confiantes que le reste du marché sur la santé du géant informatique. « Il y a environ 800 millions d’euros de dette bancaire à vendre sur le marché secondaire », dit un acteur. Trois cessions à des hedge funds auraient eu lieu.
Mais les montants sont faibles : on évoque deux blocs de 22 millions et 50 millions d’euros depuis fin 2023, et un dernier de 70 millions, vendredi 16 février, de la part d’une banque étrangère. Là où les banques demandent jusqu’à 50 % de la valeur de leur créance en effet, les hedge funds ne sont prêts à offrir que 20 % à 30 %, selon des sources. En cause, leur crainte qu’un simple aménagement des maturités de dette bancaire d’Atos ne suffise pas.
Discussions avec David Layani
Jusqu’ici, le camp des hedge funds est mené par Boussard & Gavaudan , D.E. Shaw, Tresidor Investment Management et Syquant Capital, selon nos informations. Il attend un premier remboursement de 500 millions en novembre prochain sur le 1,2 milliard d’euros qu’il détient, à maturité 2024-2025.
Mais il prépare déjà un plan B, visant à refinancer et allonger une partie de la dette d’Atos. Voire d’aller plus loin. « Ils sont prêts à apporter de l’argent, beaucoup. Certains même sont favorables à venir garantir jusqu’à 40 % d’une augmentation de capital pour consolider les fonds propres d’Atos », affirme une source.
Les hedge funds seraient entrés en contact avec David Layani, qui détient plus de 11 % du capital, pour qu’ils réinjectent de concert des fonds propres dans le géant informatique. « Ils ne vont certainement pas remettre leur destin entre les mains des banques et attendre que ça se passe », prévient une source. Interrogées, aucune des parties prenantes de ce dossier n’a souhaité faire de commentaire.
Anne Drif
https://www.lesechos.fr/finance-marches/banque-assurances/atos-les-gerants-depargne-sinquietent-de-la-restructuration-financiere-2078310
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