Cession d’Atos à Kretinsky : le Sénat va lancer une mission d’information [CHALLENGES]

Vigilance sur le dossier oui, nationalisation non. Bruno Le Maire appuyait le même jour aux Assises de l’industrie : « Ma responsabilité n’est pas d’investir dans l’entreprise [Atos], c’est de protéger les technologies les plus sensibles, a-t-il expliqué. Elles seront protégées ». Il prenait pour exemple Segault dont Bercy a bloqué la cession à l’américain Flowserve. « Atos n’a pas besoin de la tutelle de l’Etat mais d’investisseurs et de partenaires industriels », poursuivait Barrot au Sénat.

Justement, c’est le futur investisseur qui inquiète au plus haut point. Tech Foundations et son activité d’infogérance, l’enfant malade d’Atos, doit être cédé à l’homme d’affaires Daniel Kretinsky, qui obtient également 7,5 % d’Eviden, la seconde moitié d’Atos regroupant les métiers les plus sensibles et les plus rentables : le digital, le cloud, le big data et la cybersécurité.

Les arguments avancés par les ministres n’ont pas convaincu les sénateurs du groupe LR. Selon nos informations, la Commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat va lancer une mission d’information sur le rachat d’Atos. Elle pourrait déboucher sur une enquête parlementaire. A l’Assemblée nationale, les députés Philippe Brun (PS) et Olivier Marleix (LR) suivent également le dossier. Une commission d’enquête pourrait suivre une fois l’opération de cession terminée. C’est pour le moment une “menace” pour pousser le gouvernement à tout mettre en œuvre pour éviter un Alstom bis.

L’arrivée au capital de OnePoint, qui détient désormais 9,9 % d’Atos et en fait l’actionnaire de référence, n’a guère apaisé les craintes des parlementaires, ni celle de certains petits actionnaires. Ironie de l”histoire, l’entreprise de David Layani avait proposé 4 milliards d’euros en septembre 2022 pour s’offrir Atos. Bertrand Meunier, l’ancien PDG, avait retoqué cette offre estimant que l’acheteur et ses 500 millions d’euros de chiffre d’affaires ne pesaient pas assez lourd face aux 11 milliards de revenus d’Atos.

L’entreprise de David Layani annonçait même mercredi avoir levé un financement pouvant aller jusqu’à 500 millions d’euros auprès de l’américain Carlyle Global Credit. Cet argent pourrait-il servir à poursuivre l’offensive sur le groupe français ?

Certes le fonds américain Carlyle, né aux États-Unis dans les années 80 de la collusion d’intérêts militaires, politiques et financiers, ne devrait avoir aucun pouvoir décisionnel direct chez Atos mais l’annonce relativise les arguments de souveraineté dont s’était servi David Layani pour expliquer sa prise de participation. Les sénateurs enquêteront-ils aussi sur cette possible opération ?

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